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Rixe, accident du travail ou non ?

  • Photo du rédacteur: Rodolphe BAYLE
    Rodolphe BAYLE
  • 21 oct. 2024
  • 5 min de lecture

Cour d'appel de Versailles, 26 septembre 2024, 23/00779


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Définition de l'accident du travail


Un accident du travail, défini par l'article L. 411-1 du Code de la sécurité sociale, correspond à tout accident survenu « par le fait ou à l'occasion du travail », quelles qu'en soient les causes. Cette définition s'applique à toute personne travaillant pour un ou plusieurs employeurs, quel que soit le lieu où l'accident survient. Concrètement, un accident est qualifié d'accident du travail dès lors que trois critères sont réunis : l'existence d'un fait accidentel brusque et soudain, la survenue d'une lésion, et un lien de causalité avec le travail​


La présomption d'imputabilité est un élément clé de cette qualification. Elle s'applique aux accidents survenus au temps et lieu du travail. Autrement dit, lorsque l'accident se produit pendant les heures de travail, sur le lieu de travail, il est présumé lié à l'activité professionnelle. Cette présomption peut être contestée par l'employeur.


Il est également important de noter que l'appréciation des « lieux de travail » est large, incluant non seulement les espaces strictement professionnels (bureaux, chantiers), mais aussi les dépendances de l'entreprise telles que les aires de stationnement ou les voies d'accès, dès lors que le salarié est encore sous la subordination de l'employeur​.


Les rixes au travail qualifiées d'accident du travail ?


Les rixes, ou altercations entre salariés, posent des questions spécifiques en matière de qualification d'accident du travail. Selon la jurisprudence, une rixe survenant sur le lieu et au temps de travail peut être considérée comme un accident du travail, même si elle est étrangère à l'activité professionnelle.


Néanmoins, cette présomption peut être renversée si l'employeur ou la CPAM démontrent que la victime s'est soustraite à l'autorité de l'employeur ou que les violences étaient totalement étrangères au travail​


Dans le cadre des rixes, la difficulté réside souvent dans l'appréciation du lien de subordination au moment de l'incident. Si la rixe intervient après la fin du service, par exemple sur un parking ou dans une zone de l'entreprise où le salarié n'est plus sous la surveillance directe de l'employeur, la présomption d'imputabilité peut être remise en cause.


Toutefois, la jurisprudence a également évolué en reconnaissant le caractère professionnel d'incidents survenus après la cessation du service, lorsqu'il est démontré que le conflit trouve son origine dans le cadre du travail​


Dans le cas particulier des rixes, il est essentiel de distinguer les situations où le conflit découle de la subordination professionnelle, ce qui maintient le caractère professionnel de l'accident, de celles où il s'agit d'un différend purement personnel entre les salariés, excluant ainsi la qualification d'accident du travail.


Illustration de l'arrêt de la Cour d'appel de Versailles, 26 septembre 2024


Pour illustrer la question de la qualification des rixes comme accident du travail, examinons l'arrêt de la Cour d'appel de Versailles rendu le 26 septembre 2024 (n° 23/00779). Cet arrêt permet de bien comprendre les enjeux de la reconnaissance d'un accident survenu dans un cadre professionnel mais dans des circonstances particulières.


Contexte de l'affaire

Dans cette affaire, une salariée, employée en qualité d'agent de restauration, a été victime d'une altercation survenue sur le parking de son lieu de travail, quelques minutes après la fin de son service, le 8 mars 2019. Selon les faits rapportés, la salariée venait de débadger et se rendait à son véhicule lorsqu'une altercation a éclaté avec deux autres collègues, se soldant par une rixe physique. Cet incident s'est produit en dehors des horaires de travail officiels, alors que la salariée avait déjà quitté son poste de travail.


La Caisse Primaire d'Assurance Maladie (CPAM) des Yvelines avait initialement pris en charge cet incident au titre de la législation sur les accidents du travail, considérant que l'accident s'était produit sur le lieu de travail, immédiatement après la fin du service. La CPAM s'appuyait sur la présomption d'imputabilité qui s'applique lorsque l'accident survient pendant ou à proximité immédiate du temps et du lieu de travail. Toutefois, la société employeuse a contesté cette décision, arguant que l'accident était le résultat d'un conflit personnel, sans lien avec l'exécution des missions professionnelles de la salariée.


Arguments des parties

La société employeuse a avancé plusieurs arguments pour contester la prise en charge de l'incident par la CPAM. Selon l'employeur, l'accident était survenu après la fin des horaires de travail, alors que la salariée avait déjà débadgé et se trouvait sur le parking pour rentrer chez elle. La société a insisté sur le fait que la salariée n'était plus sous la subordination de l'employeur au moment des faits, puisque la subordination cesse dès lors que le salarié a quitté son poste et terminé son temps de travail officiel. En outre, la société a souligné que la rixe résultait de tensions personnelles entre les salariées, ce qui excluait tout lien avec l'activité professionnelle.


De son côté, la CPAM a fait valoir que la présomption d'imputabilité pouvait être retenue puisque l'incident s'était produit à proximité immédiate de la fin du service et sur un lieu dépendant de l'entreprise, à savoir le parking. La CPAM a également argumenté que les tensions entre les salariées pouvaient avoir été exacerbées par des facteurs liés à l'environnement de travail, ce qui justifiait une prise en charge au titre des accidents du travail.


La Cour rejette la qualification d'accident du travail de cette rixe

La Cour d'appel de Versailles a confirmé le jugement du Tribunal judiciaire de Nanterre, déclarant inopposable à la société la décision de la CPAM de prendre en charge l'accident. Pour rendre sa décision, la Cour a estimé que la preuve d'un lien entre la rixe et l'activité professionnelle n'était pas suffisamment établie.


Le raisonnement de la Cour repose sur plusieurs éléments. Tout d'abord, les juges ont considéré que l'incident avait eu lieu après la fin des horaires de travail de la salariée, alors qu'elle avait déjà débadgé. Cela signifie que le lien de subordination entre l'employeur et la salariée était rompu au moment de l'incident. La Cour a rappelé que la présomption d'imputabilité s'applique uniquement si l'accident survient pendant les heures de travail ou sur un lieu placé sous l'autorité de l'employeur, dans le cadre de l'exécution des missions du salarié.


Ensuite, la Cour a examiné la nature de l'altercation et a conclu qu'il s'agissait d'un conflit personnel entre les salariées, sans lien direct avec leurs fonctions professionnelles. En l'absence de preuve que la rixe était liée à l'exécution du travail ou aux conditions de travail, la Cour a estimé que la qualification d'accident du travail ne pouvait être retenue.


Enfin, bien que l'incident se soit produit sur le parking de l'entreprise, la Cour a jugé que ce lieu, bien qu'appartenant à l'employeur, ne suffisait pas à établir un lien de subordination au moment des faits. Le fait que la salariée ait déjà quitté son poste et se préparait à rentrer chez elle a été déterminant pour écarter la qualification d'accident du travail.


Points à retenir


1. Lien de subordination : L'arrêt souligne que le lien de subordination entre le salarié et l'employeur est essentiel pour qualifier un incident d'accident du travail. En l'absence de ce lien, comme c'était le cas ici où la salariée avait terminé sa journée de travail, la présomption d'imputabilité peut être remise en cause.


2. Conflit personnel : La nature de l'altercation est également cruciale. Si la rixe est motivée par un conflit personnel sans lien avec l'activité professionnelle, elle ne sera pas qualifiée d'accident du travail.


3. Zone de travail : La localisation de l'incident est également un facteur décisif. Bien que l'incident ait eu lieu sur le parking de l'entreprise, la Cour a estimé que le lien avec l'activité professionnelle était rompu du fait que la salariée avait quitté son poste de travail.

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