Inopposabilité confirmée : la Cour d'appel de Versailles défend le principe du contradictoire
- Rodolphe BAYLE
- 15 juil. 2024
- 2 min de lecture
CA Versailles, ch. protection soc. 4 7, 13 juin 2024, n° 22/01378. Lire en ligne : https://www.doctrine.fr/d/CA/Versailles/2024/CAP076C8D6CB472CC7F28C5
Contexte
Le 14 septembre 2017, M. [R] [J], salarié de la société S.A.S. [5], a été victime d'un accident de travail. La CPAM de Saône-et-Loire a pris en charge cet accident au titre de la législation professionnelle. L'état de santé de l'assuré a été consolidé le 15 septembre 2018 et un taux d'incapacité permanente partielle (IPP) de 10 % lui a été attribué par décision du 18 décembre 2018. La société a contesté ce taux devant le tribunal judiciaire de Nanterre, qui a ordonné une expertise médicale confiée au Dr [G]. Ce dernier a rendu son rapport le 30 octobre 2020.
Par jugement du 28 mars 2022, le tribunal a confirmé le taux d'IPP de 10 % et a débouté la société de ses demandes.
La société a fait appel de ce jugement.
Lors d'une première audience le 22 mars 2023, la cour a ordonné la réouverture des débats pour que les parties puissent s'expliquer sur le non-respect par l'employeur du délai de dix jours pour solliciter le rapport médical.
Problématique
La question principale posée à la Cour d'appel était de savoir si le principe du contradictoire avait été respecté lors de la transmission du rapport médical par la CPAM, et si le non-respect de ce principe pouvait rendre la décision de la caisse inopposable à la société.
Décision
La Cour d'appel de Versailles s'est basée sur l'article R.142-16-3 du Code de la sécurité sociale, qui régit les procédures de transmission des rapports médicaux entre les parties impliquées dans un litige de sécurité sociale.
Cet article impose que le greffe demande aux organismes de sécurité sociale de transmettre les rapports médicaux à l'expert désigné dans un délai précis.
La société S.A.S. [5] a contesté le taux d'incapacité permanente partielle (IPP) attribué à son salarié par la CPAM de Saône-et-Loire. Une expertise médicale a été ordonnée par le tribunal judiciaire de Nanterre, et le Dr [G] a été désigné comme expert.
L’expertise devait être réalisée dans des conditions respectant le principe du contradictoire, ce qui implique que toutes les parties puissent consulter les rapports médicaux en temps opportun.
La Cour a constaté que la société avait demandé la communication du rapport médical à plusieurs reprises (les 7 octobre et 18 novembre 2020), mais ce rapport n’a été communiqué que le 3 décembre 2020, soit après la date de rédaction du rapport d'expertise (30 octobre 2020).
En conséquence, la société n’a pas eu la possibilité d’émettre des observations avant la finalisation du rapport d’expertise.
La Cour rappelle que le principe du contradictoire est un droit fondamental dans toute procédure judiciaire, garantissant à chaque partie la possibilité de connaître et de discuter de toutes les pièces produites dans le cadre de la procédure.
En l’espèce, la société n’a pas pu exercer ce droit, car elle n’a pas eu accès au rapport médical dans les délais requis.
En raison de ce manquement, la Cour a jugé que le principe du contradictoire n'avait pas été respecté. La conséquence directe de cette violation est que la décision de la CPAM fixant le taux d'IPP à 10 % doit être déclarée inopposable à la société.
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